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Jardin et Santé

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Si l’OMS, l’organisation mondiale de la santé préconise que chaque citoyen a droit à au moins à une surface minimale de dix mètres carrés d’espace vert, c’est que la nature en général et le végétal en particulier jouent un rôle principal dans l’équilibre et le bien-être de chaque individu. Depuis toujours, c’est dans la nature que l’homme trouve les remèdes pour soigner les maladies. Outre leur utilisation comme médicaments, les plantes spontanées et celles plantées dans nos parcs et jardins jouent un rôle indéniable sur notre santé. Leur présence dans un milieu hospitalier crée des conditions favorables pouvant accélérer la guérison. Leur ombre et parfums ainsi que la gamme des verts de leur feuillage et les palettes des couleurs de leurs fleurs ont une influence indirecte sur l’état psychique des patients et contribuent à l’amélioration et l’optimisation des thérapies poursuivies.
Dans certains pays quand des malades s’adonnent au jardinage, les médecins constatent une nette amélioration de l’état de santé de leurs patients et ce grâce à cette activité.
Aujourd’hui plusieurs disciplines scientifiques et médicales collaborent avec des botanistes et des paysagistes pour que les jardins des hôpitaux contribuent d’avantage à l’amélioration des soins et créent un cadre propice à l’épanouissement des patients et du personnel médical.
Au cours de cette table ronde, des spécialistes du jardin, des plantes et du bien-être du Maroc et de France ont été échangéleurs expériences sur le thème « jardin et santé ».

Dr. Khadija Belakziz : Le jardin est cet espace harmonieux que la nature nous offre pour vivre, nous nourrir et nous soigner. Nous sommes tous sensibles aux beautés et à la générosité de la nature qui nous entoure. Pour nous, musulmans, le paradis est un jardin ! Voici une parole de notre prophète SWS : « si l’Heure (du jugement dernier) sonne et que l’un d’entre vous a une bouture avec lui, s’il peut la planter avant de se lever, qu’il le fasse». Belle leçon de préservation de l’environnement.
La santé de l’homme dépend de la façon avec laquelle il bouge et se maintient, de la façon avec laquelle il respire et se nourrit, de la façon avec laquelle il ressent et pense, de la façon avec laquelle il laisse circuler l’énergie. Qu’apporte le jardin à cet égard ? Il permet, tout d’abord de bouger par le jardinage, le sport, la promenade et les jeux... Cela permet de respirer de l’air frais, de l’oxygène, de l’air pur. Dans un jardin, il y a 250 bactéries par m2 au lieu de 40 000 à 1 million dans un grand magasin et 5 000 à 75 000 dans une rue centrale ! Grâce au jardin, on peut conserver la masse musculaire, lutter contre l’obésité, réduire les risques du diabète ou des accidents cardiovasculaires et vaincre l’ostéoporose.
Le jardin permet ensuite de respirer et de se nourrir. Le ratio d’espace vert par habitant est de 10 m2 par habitant. A Marrakech, on aurait 11 m2 (350 ha + 10 000 ha de la palmeraie + 500 ha de l’oliveraie de l’Agdal et 80 ha pour la Ménara). A Casablanca, on ne dispose que de 1 m2 par habitant. Vivre à moins d’un km d’un espace vert est bénéfique pour les maladies respiratoires : asthme, bronchites, allergies, selon une étude épidémiologique de 2009.
La santé peut aussi être présente au jardin dans ce qu’on peut obtenir en cueillant légumes et fruits. Les légumes, les salades et les fruits sont, en effet, gorgés de vitamines, de sels minéraux et d’oligo-éléments. En cas de pathologies, tout un ensemble de plantes médicinales et aromatiques est disponible. Mais le jardin permet aussi de ressentir et de penser. A ce titre, il peut agir sur la santé mentale de manière sensible selon une étude épidémiologique de 2009 qui montre que les troubles anxieux sont diminués d’un tiers et la dépression d’un cinquième.
L’association «jardins et santé» octroie une aide financière pour la création de jardins «destinés à améliorer la vie des patients atteints d’affections cérébrales et de leur famille» et donne des bourses pour la recherche médicale autour du cerveau et de ses affections. Car le jardin, lieu social, réconcilie culture et nature, action et contemplation, aidant en particulier les patients atteints d’affections cérébrales à être mieux dans leur corps, dans leur tête et dans la vie.
Certains croient que, selon leurs essences, les arbres suggèrent un état d’âme : un bouquet d’arbres tourmentés aux branches pendantes mènerait aux pensées mélancoliques, un groupe d’arbres robustes inviterait à la réflexion, des arbres fruitiers et à feuillage clair seraient chargés d’allégresse et un jardin sans verdure, composé seulement de pierres et de sable, comme à Kyoto, induirait la méditation. On peut donner l’exemple du temple Ryoan-Ji à Kyoto au Japon, connu surtout pour son célèbre jardin sec de gravillons ratissés par un moine bouddhiste de la même façon depuis 500 ans, tous les matins à l’aube... S’y manifeste la pensée zen à l’état pur à la fois humide et planté de mousse et possédant aussi un jardin sec de cailloux où l’on trouve quelques marches pour s’asseoir et méditer. On peut y sentir la circulation d’énergie, se relier à la nature et à l’univers, réduire le stress, développer le calme et la sérénité, méditer et vivre au rythme des saisons, éveiller les sens par les images, les couleurs, les saveurs, les odeurs et les mélodies qu’offre ce jardin.
Pour résumer, le jardin crée en nous une harmonie et nous maintient en santé ou nous aide à la rétablir ou à l’améliorer. Encore faut-il que nous veillons à sa santé! En effet, si l’on constate ce que nous faisons subir à ses éléments (air, eau, sol, lumière et température), nous pouvons nous demander ce que pourrait être un bon usage du jardin. Quelle est la solution ?
Nous pensons que l’adoption d’une agriculture selon le mode biologique pourra protéger la santé contre les effets de l’environnement. Les animaux d’élevage bio peuvent se comporter naturellement dans un cadre protégé où ils jouissent de l’espace et ont une nourriture saine. Pour cela, des auditeurs font le suivi et le contrôle de l’agriculture bio. L’agriculture bio nous donne une nutrition bio qui a une conséquence directe sur notre santé : «que ton aliment soit ton médicament !» avait déjà conseillé Hippocrate.
Pourquoi consommer des produits bio ? On doit le faire pour protéger sa santé en contrôlant leur qualité, leur composition et leur goût, pour se prémunir contre les maladies. On diminue ainsi les résidus de pesticides dans notre corps (dans le sang ou dans le corps du fœtus). Cela se fait à travers notre alimentation, les usages domestiques, urbains, etc. Le bilan de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes reconnaît la présence de résidus dans tous les aliments (fruits, légumes, céréales, poisson, eau, jus...). Une pomme reçoit 27 traitements de pesticides en moyenne. On nous conseille donc de l’éplucher, mais nous perdons les nutriments qui se concentrent dans la peau ! Les tomates d’Espagne contiennent des résidus dans 81 % des cas, et 7 % dépassent les limites maximales (LMR) autorisées. 70 % des fruits contiennent des résidus (contre 65 % en 2006) et 8,5 % dépassent les limites.
Manger bio permet de manger moins, mais nettement mieux en terme d’apports en vitamines, sels minéraux, oligo-éléments, fibres, sucres...et, en prime, on a un meilleur apport gustatif. Cela permet aussi de manger et de valoriser les produits de saison et du terroir bien plus bénéfiques pour la santé et de moindre coût. Car les produits fabriqués hors saison ont perdu leurs nutriments et ont coûté cher en frais. On peut ainsi faire des économies en réduisant ce qui est cher et mauvais pour la santé. On évite, en particulier, la viande issue d’animaux mal nourris et stressés. Le fait de réduire l’élevage du bétail a des conséquences pour l’écologie. On observe la diminution de méthane rejeté dans l’air (600 litres par jour et par vache), la réduction de la consommation d’eau utilisée pour abreuver le bétail, la réduction du rejet d’azote dans les rivières, enfin la réduction de la culture des plantes et céréales destinées à l’alimentation de bétail.
Pour savoir quels sont les bons soins destinés à un jardin, on peut consulter les conseils donnés par Perelandra, un centre de recherche sur la nature en Virginie qui date de 1975, lorsqu’il fut créé par Machaelle Small Wright. Ce jardin est un laboratoire vivant. On peut y découvrir et appliquer les principes et les dynamiques de co-création entre l’homme et les intelligences de la nature, ceci désignant tous les «habitants» du jardin, animaux, minéraux et végétaux. Selon le créateur de ce jardin, tous sont amis et œuvrent ensemble à une harmonie vitalisante qui maintient tout le jardin en bonne santé. En 1984, on y a créé des élixirs de rose et plus tard d’autres élixirs ont vu le jour. Ces élixirs sont censés équilibrer et soutenir la personne dans sa globalité et faire agir les mécanismes qui se mettent en place durant des transformations ou une évolution dans notre vie.
Ainsi l’élixir «peace» (jaune ourlé de rose), ouvre au courage, à l’élan de l’âme dans la dynamique universelle, l’éclipse (doré) aide l’acceptation, développe l’intuition, élargit notre compréhension de la transformation et de la croissance intérieure. Le cauliflower (chou-fleur) serait l’élixir de bien-naître. Il suffirait de quelques gouttes données à la mère au moment de la naissance pour éveiller dans l’enfant le climat intérieur pour faire face à l’aventure qui l’attend. Le « corn « (maïs), élixir tiré de la fleur de maïs, stabilise la fusion de l’âme et du corps pendant des périodes d’expansion spirituelle ou universelle, la «tomate» (fleur de tomate) ferait voler «en éclat» ce qui cause l’infection et cela prévient donc également l’infection.
Par ailleurs, on aurait aussi les élixirs floraux du Dr Edward Bach. Ce sont 38 élixirs à base de fleurs d’arbres et de fleurs sauvages en dehors de «rock water» (l’eau de roche) et chacun d’entre eux correspond à une émotion et à un état d’esprit particulier. En adoptant une attitude positive, on stimulerait les capacités auto-curatives que chacun possède en soi. «Pour être en bonne santé, il faut être en harmonie avec son âme» disait Bach. Citons quelques exemples, celui de la «clématis» (clématite) qui incite à la rêverie, au manque d’intérêt pour le présent, le «crab apple» (pomme sauvage) qui traite la culpabilité ou le sentiment d’impureté, la verveine destinée à l’enthousiasme excessif.
L’homéopathie est une médecine découverte par Hahnemann au XVIIIe siècle. Elle utilise 3500 substances végétales, animales, minérales ou chimiques. Elle considère l’individu dans sa particularité et soigne par ce qui est semblable à la maladie avec des doses infinitésimales.
En conclusion, on peut rappeler cette phrase de Saint-Exupéry : «La terre ne nous appartient pas, nous l’empruntons à nos enfants». Soyons donc des éco-consommateurs, des «consom-acteurs» et cela pour la santé de l’homme et de la terre. Qu’on se souvienne de la parole du prophète, SWS, : «chaque fois qu’un musulman plante un arbre ou sème une graine, il aura à son actif comme aumône tout ce qui aura été mangé du produit de cette plante par un oiseau, un homme ou un quadrupède».

Pascale Garbe : Je suis étonné du dynamisme qui existe à Marrakech en matière de jardins. Nous sommes ici au cœur d’un des plus beaux jardins de Marrakech. La plupart des plantes qu’on y trouve, oliviers ou palmiers, ont été utilisées pour la santé. Je suis sûr que le travail fait ici à Marrakech portera ses fruits dans les années à venir. Ce festival n’en est qu’à la quatrième édition. On peut l’applaudir car son travail est fantastique.
Lorsqu’on m’a demandé d’intervenir à cette table ronde, j’ai constaté que l’on pouvait aborder le sujet des rapports entre jardin et santé sur plusieurs plans, qu’il s’agisse de la santé au quotidien ou de la thérapie par les plantes. J’ai essayé d’introduire le débat d’un point de vie historique. J’ai l’impression qu’on trouve à peu près partout un lien entre jardin et santé. Dans toutes les civilisations, les jardins ont été faits pour la santé et le bien-être de l’être humain. Les jardins de Babylone en sont un exemple. On y cultivait, en effet, des plantes utilisées pour le bien-être de l’homme. Les jardins chinois, outre la représentation miniature du paysage, étaient un jardin où l’on trouvait des plantes utilisées au quotidien pour le bien de l’homme.
En France, le premier acte écrit qui mentionne un jardin est un écrit du temps de Charlemagne. Il s’agit d’un inventaire de toutes les plantes utiles pour soigner l’homme. Ensuite, on sait que ce jardin médiéval fut organisé en forme de carrés. Mais il ne s’agit là que d’un artefact esthétique. Le but fondamental est bien de soigner l’homme.
Il y a une seule civilisation importante qui n’a pas véritablement utilisé le jardin pour la santé, c’est la civilisation japonaise. Le jardin existe dans un projet qui met en avant la spiritualité. On le voit dans les jardins de Kyoto ou de Tokyo. On ne trouve dans ces jardins que très peu de plantes utilisées pour le bien-être ou la santé de l’homme. Le jardin japonais est plus approprié pour la méditation psychique. On l’oublie trop souvent, mais les jardins du Japon sont attachés à des monastères.
Toutes les approches de jardiniers du XIXe et du XXe siècles qui ont été utilisées dans les jardins d’Europe sont liées à un point de vue esthétique. Pour les panaris, on savait néanmoins qu’il fallait faire un cataplasme avec la mauve à cause de ses effets anti-inflammatoires. Aujourd’hui, ce savoir est malheureusement oublié. Les remèdes qui étaient alors connus n’ont pas été maintenus. Car faire survivre ce savoir est trop compliqué. Les jeunes générations vont plus facilement chez le pharmacien. Petit à petit, ce savoir s’est perdu et le jardin n’est plus aujourd’hui associé au mot santé. Dans les années 70-80, ce sujet est cependant revenu à la mode.
Les Américains sont les premiers à l’avoir fait. Leurs hôpitaux sont aujourd’hui, dans ce domaine, à la pointe. Plus récemment, on a aussi vu des projets australiens voir le jour. Se créèrent, dans ces deux pays, des jardins thérapeutiques destinés à mieux renforcer la santé. Durant la seule année 2009, on a dépensé aux États-Unis 30 000 millions de dirhams pour créer des jardins dans les hôpitaux. Ainsi à Los Angeles, il existe un très beau jardin créé pour les enfants autistes. Au Texas, un jardin a été ouvert en 2007 pour les adultes atteints de la maladie d’Alzheimer. Le Memorial Hospital de Chicago possède des jardins adaptés à chacune des formes de pathologies. Les États-Unis s’intéressent donc à ce sujet de cette manière. On commence à se dire, en France, que les hôpitaux ont été tous bâtis, il y a quelques dizaines d’années, sur le même modèle avec des voies rapides pour aller très vite au service des urgences puis, s’il reste de la place, on a pensé à mettre un peu de gazon ou parfois des œillets nains ou d’autres plantes. Les concepteurs ce type d’établissement pensent désormais qu’il faut des espaces où les patients pourront aller se reposer ou se promener.
On considère ainsi que les plantes peuvent aider à maintenir ou à améliorer la santé à tel point que le marketing s’est emparé de ce thème de la santé par les plantes. On a tous vu de la publicité pour tel produit comportant de la vanille de Madagascar censé améliorer la qualité de vie, en particulier la tonicité des corps. Si l’argent s’y mêle, on pourra peut être retrouver ces savoirs que nos arrière-grands-parents avaient en matière de jardins et de plantes médicinales.
Cela correspond aussi à une demande nouvelle apparue durant la période des années 1980-1990. De nombreuses personnes se sont alors montrées très préoccupées par ces questions et ont manifesté un besoin de retour à la nature. Le jardin, en France, est désormais le deuxième passe-temps favori des Français. Il y a aussi l’engouement pour toute une série de produits naturels dans les supermarchés. On connaît le slogan : «C’est naturel, donc c’est bon pour la santé», même si c’est là un argument purement économique. Il y a là une évolution avec ce thème du retour à la nature. Le jardin devient un argument commercial.
On peut tous être, un jour, en mauvaise santé. On aura forcément envie d’aller dans l’hôpital qui aura le cadre de vie le plus intéressant à nos yeux. On sait, en effet, qu’on va pouvoir guérir plus vite ou qu’on y aura une meilleure prédisposition pour une guérison rapide.
Depuis que le monde connaît les jardins, on a évolué. On est parti d’une définition du jardin qui était proche de la santé. Aujourd’hui, c’est la santé qui redevient un thème proche de celui des jardins. On est donc en présence d’une sorte de petite inversion. En tout cas, les deux mots n’ont jamais été très éloignés l’un de l’autre si ce n’est au début du XXe siècle.

Philippe Carreaud : J’ai passé vingt ans de ma vie dans un bureau. Maintenant, je vis dans un jardin, seul dans la nature. Je suis donc entouré par des plantes, mais ce qui m’intéresse en ce lieu n’est pas le point de vue esthétique. Je peux m’expliquer.
J’ai toujours, en effet, été impressionné par le travail des enfants, en particulier par ceux qui ont réalisé les jardins scolaires qu’on peut voir actuellement dans ce jardin de la Ménara. Ces enfants se sont montrés créatifs et motivés. Dans leurs œuvres, ils disent l’essentiel sur le jardin et la santé. Lorsqu’ils conçoivent des jardins à but thérapeutique, ils mettent spontanément en avant les thèmes du goût, des parfums et des couleurs. On le voit particulièrement dans le jardin nommé «Notre jardin, votre toubib».
A travers le jardin, on peut consommer moins de médicaments. On observe, en effet, que la consommation de médicaments, dans un projet thérapeutique adapté, diminue. Les enfants sont, sur ce point, très lucides. Il y a, parmi les jardins scolaires, un jardin nommé le « labyrinthe de la santé « qui illustre cela. Les Américains sont en avance sur nous car ils ont posé la problématique des jardins thérapeutiques. La fréquentation de tels lieux rend les personnes plus calmes, moins angoissées. En outre, on remarque que si les malades fréquentent ces jardins, le personnel soignant, lui aussi, est moins angoissé. On a là des lieux de repos, de promenade, mais aussi des lieux de rééducation car on peut y pratiquer des activités de jardinage, ce que l’on nomme l’hortithérapie.
Le besoin de nature est un réel besoin pour tous les âges. En Égypte, il y avait des lieux conçus pour les personnes atteintes de maladies mentales. Dans la nature, on est en présence de la couleur verte, du soleil, on respire un autre air. Au XIXe siècle, tous les hôpitaux psychiatriques possédaient en Europe un parc où pouvaient sortir les patients. Le simple fait d’avoir, depuis sa chambre, une vue sur un jardin permet de se sentir bien ou le mieux possible. Dans ce qu’on appelait les « asiles de fous «, souvent, on voyait des jardins potagers très bien tenus. On s’extasiait devant les alignements de poireaux et de salades. Ces jardins étaient excessivement bien ordonnés alors qu’existait un désordre total dans les têtes de ceux qui les soignaient. Cela faisait beaucoup de bien, et pas seulement aux patients car les légumes produits servaient à la préparation des repas. On pouvait donc servir aux malades des repas sains, car pour produire ces légumes, on n’utilisait pas d’engrais ni de pesticides.
Dans les années 1950 à 1990, les hôpitaux sont devenus en Occident de grands buildings avec l’air conditionné. La nature y a été remplacée par des parkings et on a donné une grande importance à la circulation des voitures. En se transformant ainsi, l’hôpital est devenu un milieu hostile et même particulièrement stressant pour les malades, les soignants et les visiteurs. La tendance s’inverse vers 1990 aux États-Unis. On reste en France encore, dans ce domaine, en face d’expériences isolées.
Comment utiliser un jardin ? Une simple vue de la chambre sur le jardin, et même, selon une étude, de simples photographies de paysages, ont des effets apaisants. Les malades qui bénéficient de telles vues prennent moins de médicaments antidouleur que les autres et ils guérissent plus vite.
Le jardin peut être un lieu simplement de repos. Les enfants l’ont également bien remarqué. Il peut être un lieu de soins. Il existe, pour cela, des jardins en kit. Ce sont des tables qui permettent de jardiner debout, ce qui est utile pour des malades très âgés, ou, pour des personnes handicapées qui ne peuvent plus le faire autrement. Il est même possible de jardiner en fauteuil roulant. Les personnes vont planter des graines, voir la plante pousser et elles récolteront le fruit de leur travail.
Quelles sont les contraintes de base auxquelles sont soumis de tels jardins thérapeutiques ? Il faut tout d’abord assurer l’accessibilité au jardin. Ensuite, ce jardin doit être clos car une partie de la population des hôpitaux peut avoir tendance à s’échapper. Il faut un sol adapté, sans gravillons et sans cailloux, car si on a de tels sols, il est impossible de se déplacer en fauteuil roulant. Il faut ensuite des allées assez larges. On doit disposer de bancs à l’ombre pour l’été. Des aires de jeu sont nécessaires pour les enfants. Des coins isolés doivent être créés pour recevoir les familles. Il faut aussi du personnel. Or on manque actuellement de personnel dans les hôpitaux, ne serait-ce que pour accompagner les personnes non autonomes ou à mobilité réduite. Car il faut prendre du temps pour cette prise en charge du malade dans un milieu naturel constitué par des jardins. De plus, il convient de faire attention aux plantes toxiques, comme le laurier-rose ou le datura.
Tous les malades peuvent être concernés par ces jardins? C’est vrai, en particulier, pour deux types de malades, les personnes âgées et celles qui sont atteintes par la maladie d’Alzheimer. Habituellement, ces personnes ne sortent plus. Elles restent enfermées toute la journée. Il y a là un véritable drame humain. C’est une des raisons de la surconsommation de médicaments dans les milieux hospitaliers. On peut ensuite penser aux handicapés. Il existe aussi des jardins pour les malades atteints de cancer ou pour les enfants. Ces fonctions multiples des jardins hospitaliers expliquent la difficulté de créer un jardin car il existe plusieurs types de populations dans des hôpitaux généralistes.
On devrait ajouter aux contraintes déjà énumérées que de tels jardins devraient être des endroits calmes et sans nuisance sonore, où l’on ne doit pas entendre le bruit des camions ou des voitures. Sinon des personnes comme celles qui sont atteintes par la maladie d’Alzheimer vont être désorientées. On sait que ces personnes perdent la mémoire et elles ont des problèmes de langage. Un des points clé de la thérapie par les jardins est de réancrer ces personnes dans leur passé. Or il leur reste de la sensibilité, au moins chez certaines d’entre elles. Un hôpital de Nancy, où se trouve une unité qui traite les patients atteints de la maladie d’Alzheimer, a un jardin planté de mirabelliers, un arbre typique de la région. Les gens qui le fréquentent peuvent se rappeler leur passé, leur petite enfance, ce qui peut aussi donner lieu à la fabrication de tartes pour réancrer ces personnes dans leurs souvenirs.
On pourrait faire de même ici en utilisant un jardin comme celui de la Ménara, avec ses oliviers, ses arbres d’agrumes comme ces citronniers ou ces orangers, mais aussi avec des herbes aromatiques parfumées comme les diverses menthes. Il conviendrait d’éviter les jardins de cactus ou de graminées comme ce qu’on peut voir autour de l’école de cinéma de Marrakech. Ces jardins sont d’introduction récente. On s’y sent étranger car cela n’existait pas dans l’ancien temps. Un autre point important, lié à ces jardins thérapeutiques, est le pouvoir qu’ils ont de marquer l’évolution du temps, de bien faire observer les changements des saisons. Ceci est marqué par les floraisons, l’éclosion de tulipes, de jonquilles, des fleurs de printemps, puis, plus tard, par la perte des feuilles. A chaque moment du temps, il y a des floraisons spécifiques.
On peut aussi créer des surprises pour capter l’attention des malades. On peut mettre dans ces jardins des fontaines ou des jets d’eau. Il convient néanmoins d’être très vigilant et donc de concevoir ces jardins en relation avec les médecins, le personnel soignant et les malades. Il est, en effet, possible d’aller trop vite en besogne et d’obtenir l’effet inverse de celui qu’on attend. Il ne faut pas créer de confusion aux carrefours dans l’esprit de certains malades. Il est nécessaire de toujours guider les gens dans leurs choix. Certains malades ont besoin d’une pergola, car ils y ont le sentiment d’être couverts, de se sentir en sécurité. De plus, cet espace donne de l’ombre en été.
Voilà quelques aspects qui peuvent participer à la conception d’un jardin thérapeutique, d’un lieu qui peut répondre chez les patients à un besoin humain de contact avec la nature.

Jalil Belkamel : Le thème de la santé liée aux jardins est un thème qui intéresse tout le monde. Hippocrate ne disait-il pas que c’est la nature qui guérit ? Encore faut-il savoir la préserver.
Nous faisons partie d’un biotope commun à tous les êtres vivants, d’un milieu écologique qui nous est collectif. Quand la nature va mal, il en est de même pour nous. Il est temps de reprendre contact avec cet espace qu’est la nature. Caresser une plante n’est pas un geste un peu farfelu. La plante ressent l’énergie qui émane d’une personne et il y a un retour qui se produit. Si on se promène dans un endroit sans arbre, où il y a seulement du bitume, on ne se sent pas bien. On sait également que le vert est une couleur reposante et apaisante pour les yeux. Il suffit donc de rester modeste et de contempler la nature.
J’ai, un jour, fait une expérience personnelle sous un arganier. J’étais venu sous cet arbre sans préjugé, seulement pour y voir que ce qui allait se passer sur le plan émotionnel. Ce fut une expérience qui a bouleversé ma vie. J’ai fait des expériences analogues dans une cédraie dans le nord du Maroc.
Pour moi, le jardin, c’est aussi la nature dans son ensemble qu’il faut bien observer. Et là, on peut se référer à un grand écrivain, Goethe, qui fut d’abord un grand botaniste. Il existe même, encore aujourd’hui, une discipline botanique que l’on appelle gœthéenne. Sa particularité est de partir de la forme et de la couleur de la plante pour deviner ses vertus. On abandonne le concept de causalité pour donner la primauté à celui de correspondance. Et ce que l’on trouve peut être, parfois, impressionnante.

Je vais donner quelques exemples. On peut prendre, pour commencer, celui du cyprès, un arbre que l’on nomme, en arabe, sarû et, en latin, Cupressus sempervirens. La particularité de cet arbre est d’être très long ou très fin. Quand on le regarde de très près, on constate qu’il prend l’eau dans le sol et la propulse jusqu’à son sommet. Quand on extrait l’huile essentielle de cette plante, on obtient une huile très connue dans l’aromathérapie Sa propriété est d’améliorer la circulation lymphatique, c’est-à-dire le retour du sang vers le coeur, ce qui est le cheminement inverse de celui de la circulation veineuse. Cette huile aide à résoudre les problèmes de jambes lourdes. Elle aide aussi à propulser le sang pour améliorer la circulation au sein de l’organisme. Elle permet donc d’avoir une circulation améliorée. S’il n’y avait pas eu d’observation à propos de cette correspondance, on serait passé à côté de quelque chose qui peut être intéressant.

Pourquoi maintenant la lavande mauve est une plante qui possède une tige sans feuillage avec une fleur tout au bout ? Pour rendre compte de ce fait, il existe des explications finalistes intéressantes auxquelles on peut, naturellement, ne pas croire. Cette lavande possède une couleur mauve et sa tige l’aide à avoir une ouverture vers le haut et à s’élever. On fait un usage important de l’huile essentielle de cette plante dans les états de stress. Une correspondance peut alors être imaginée entre la forme élancée de cette plante qui s’ouvre vers le haut et l’ouverture d’esprit qui se rétablit, une fois le stress surmonté. On peut ainsi induire au moins des effets placebo chez ceux qui utilisent des langues dans lesquelles cette correspondance linguistique existe.

L’arganier produit une autre huile essentielle qui est exceptionnelle pour hydrater la peau si elle est bien produite. L’arbre, on le sait, pousse dans une région difficile. Depuis 85 millions d’années, cet arbre est présent dans des aires restreintes de l’Afrique de l’ouest et de l’est de l’Amérique latine. S’il n’y avait pas d’arganier dans ces zones, il n’y aurait pas d’autres arbres. Cet arbre est épineux et sous ses feuilles, on ressent une certaine humidité et on y a l’impression de fraîcheur. On s’y sent comme hydraté. Là aussi, notre cerveau pense produire une correspondance entre deux interprétations de l’observation.

On peut donc dire qu’en observant les plantes aromatiques et médicinales, on produit des significations, qu’elles soient scientifiques ou non, qui peuvent être utiles dans des thérapies ou dans des soins dès lors que fonctionne l’effet placebo. On comprend alors énormément de choses. Mais, sur un plan moral, il ne faut pas se montrer supérieur à la nature. Je travaille dans le jardin aromatique de l’Ourika. Je constate quotidiennement qu’il est essentiel de créer des rencontres pour les gens qui le visitent en faisant appel à leurs cinq sens, surtout avec le sens de l’olfaction.

Le jardin aromatique, tel que je l’ai conçu, souligne le fait que l’olfaction a été complètement éliminée dans notre mode de vie actuel. On respire, mais, habituellement, on ne mémorise pas ce que l‘on sent sauf dans des cas très particuliers où joue la mémoire affective liée à des émotions fortes. Or l’olfaction joue un rôle important dans l’équilibre psychologique.

Il est, d’ailleurs, très important de stimuler les cinq sens. Il faut savoir vivre, en réalité, avec tous ses sens. Il faut se positionner autour de la plante, la sentir, la goûter. Je prends mon petit déjeuner avec des plantes du jardin et je dois dire que je ressens beaucoup d’effets bénéfiques le soir à cause de cette pratique. Aller respirer dans un jardin, c’est nourrir son odorat. Il faut nourrir tous ses sens. Or, je ne vois pas autre chose que le jardin pour nourrir ces cinq sens.

Faut-il ajouter qu’il ne faut pas que ces plantes soient traitées chimiquement. Elles perdent alors beaucoup de leurs vertus. Beaucoup de gens, on le sait, utilisent des tisanes. Mais souvent, les produits qui se trouvent dans les sachets sont traités. Même la menthe médicinale, il est vrai qu’il existe 1 200 variétés hybrides de menthe, que l’on met dans de l’eau chaude pour produire une infusion, est traitée. Des substances sont alors répandues dans le verre. Quand il existe des effets secondaires négatifs, ce n’est pas la menthe que l’on refuse ou qui produit des brûlures dans l’estomac, mais ces substances.

Il y a donc une autre forme de coexistence avec les plantes du jardin à instaurer. Et pour cela, il faut recommencer à observer ce qui se passe dans un jardin. Il faut voir comment des plantes se comportent par rapport à d’autres plantes. Et l’on peut alors observer des phénomènes très intéressants. Par exemple, j’ai vu que lorsque le romarin pousse à côté de certaines menthes, ces plantes se détestent et finalement, la menthe ne pousse pas.

Comment peut-on dire, pour terminer, que les plantes soignent ? On recherche aujourd’hui seulement les principes actifs, ce qui donne lieu aux usages pharmaceutiques des plantes. J’ai travaillé autrefois dans l’industrie pharmaceutique, mais j’ai aussi constaté qu’on est en présence d’un lobby qui impose certains médicaments pour des raisons avant tout économiques. Les gens, dans le temps, avaient toujours, avant l’apparition de cette industrie, observé les plantes, mais ils observaient aussi les animaux qui utilisaient, eux aussi, pour se soigner, diverses plantes, les singes en particulier. Si les animaux se sentent malades, ils recherchent telle ou telle plante et se soignent de cette façon. C’est l’observation des comportements animaux qui a donné des idées aux hommes pour leurs propres soins. On ne peut donc pas dire que l’homme est toujours supérieur aux animaux car il a aussi appris d‘eux, en particulier pour les soins par les plantes. L’homme d’autrefois, ne pouvant compter que sur lui-même, observait plus que maintenant.

Mais il n’y avait pas que les comportements des animaux qui lui étaient d’un grand secours. Certains pratiquaient, pour se soigner, des fumigations car ils avaient observé que telle ou telle maladie disparaissait avec une telle thérapie. Dans le cadre, des rituels religieux, en particulier, se sont développés des soins qui utilisèrent des odeurs de plantes brûlées. La recherche a ensuite permis de comprendre comme cela agissait.

Il y eut des formulations plus systématiques qui sont nées de ces nombreuses observations relatives aux effets positifs liés aux plantes. Les Grecs, on le sait, fabriquaient des onguents à base de myrrhe avant d’aller à la guerre, ce qui leur permettait de prodiguer des soins aux blessés. Avicenne a, lui aussi, contribué à développer ce savoir en décrivant 800 plantes et en les associant à leurs propriétés thérapeutiques.
Il décrit ainsi les qualités de la camomille, de la rose ou de la lavande.

Ces plantes sont aujourd’hui produites dans ma société et nous avons aussi pu constater des effets exceptionnels très intéressants. On sait que l’intérêt pour les plantes s’est fortement développé dans les années soixante au Maroc. Mais il s’agissait alors d’un intérêt qui était plus dirigé vers l’aromathérapie que vers la phytothérapie à proprement parler. Il est maintenant nécessaire de prendre aussi en compte cette autre façon de s’intéresser aux plantes.

Florence Binesse : J’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec les enfants. Ce festival est devenu, au fil des années, un lieu de rendez-vous. Il se trouve que je suis venue pour un échange avec des scolaires qui travaillent sur des jardins éphémères. J’ai passé trois jours avec les enfants et les enseignants et parlé avec eux du jardin et de la santé. Beaucoup m’ont dit l’importance qu’ils donnent aux couleurs, au toucher, aux odeurs, aux sens liés au jardin. J’ai même eu en face de moi un petit philosophe de 9 ans qui m’a dit que si le jardin n’était pas beau, son cœur était triste, dans le cas contraire, il se sentait heureux. Tout est résumé par cette observation.

Vous avez pu voir un jardin intitulé le « labyrinthe de la santé «. C’est un jardin consacré aux multiples sens de notre corps. On y observe qu’un jardin qui sent bon est bon pour la santé, mais si on a mis des pesticides et qu’il n’y a plus de coccinelles, ce n’est plus bon disent les enfants. Pour cette raison, l’écologie, dit une petite fille, c’est formidable. Or il y a aujourd’hui un problème énorme dans les espaces verts de nos collectivités. On y voit des massifs superbes, en particulier dans jardins publics qui sont arrosés d’engrais chimiques.
On peut donc faire un beau jardin tout en polluant. Le jardin paraît très beau, mais, en même temps, il crée des sources de pollution énormes. On puise aussi de l’eau dans la nappe phréatique et dans les rivières. Or on y trouve des traces de molécules dégradées de désherbants chimiques utilisés en agriculture ou dans les espaces verts. Et on le fait car il faut que ce soit propre et joli.

Cela se retrouve dans les captages d’eau potable que l’on doit fermer dès que l’on dépasse les normes et qu’il y a du danger pour la santé. On peut arriver rapidement à des catastrophes. Il y a aussi des problèmes d’eau au Maroc. Il y en a également en France avec la diminution des ressources en eau et on trouve donc de très fortes concentrations de pesticides. On accuse souvent les agriculteurs. Il n’y a pas qu’eux qui polluent, mais aussi les collectivités afin de réaliser les espaces verts des villes.

On peut en tirer une conclusion surprenante. Les agriculteurs travaillent sur des sols perméables. Ceux-ci jouent le rôle de filtre pour ces pesticides. Toutefois, dans les villes, si on travaille à proximité de surfaces goudronnées, les pesticides vont directement dans les eaux de surface. Pour éviter cela, on doit mener des opérations d’amélioration des pratiques phytosanitaires et horticoles.

Il faut fonctionner autrement et non à coup de désherbants chimiques. Le cyprès est l’arbre des cimetières en France. Dans ce pays, les cimetières, qui ne sont pas paysagers, devraient être l’endroit le plus propre qui soit. Ce n’est pas le cas. En effet, on désherbe ces espaces trois fois par an. Heureusement qu’il y reste des cyprès car on élimine les petites herbes que l’on accuse d’être sales. De même, les aires de jeu pour les enfants sont désherbées chimiquement. On peut donner un dernier exemple : les gazons que l’on va retrouver dans les golfs ou dans les terrains sportifs sont eux aussi sources de problèmes. Ces surfaces engazonnées sont très consommatrices d’eau, la plupart du temps, d’eau potable, mais on y utilise aussi des désherbants chimiques spécifiques pour qu’il n’y ait pas d’herbes indésirables dans les graminées. Il faut éviter de mettre en place de tels gazons. On doit accepter la mauvaise herbe.



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